L'épisode 18 est constitué par le témoignage direct de Philippe Huet. Merci à lui!
En
généalogie, la curiosité enfantine n’est pas un vilain défaut
Mon
intérêt pour la généalogie est né d’une curiosité d’enfant
alors que je passais une partie des vacances estivales chez mes
grands-parents paternels.
J’étais
alors âgé d’une douzaine d’années et aimais fouiner dans un
grenier encombré d’objets des plus hétéroclites tels un vélo
muni de roues en bois, un poste à galène et autres « vieilleries ».
Un
jour, je découvris une boite à biscuits en fer. Rouillée,
recouverte d’une épaisse couche de poussière, elle n’avait
manifestement pas été ouverte depuis de nombreuses années. Cela ne
pouvait que piquer ma curiosité de jeune garçon en quête d’un
trésor. Elle contenait des lettres et des photos que la pénombre ne
me permettait pas de déchiffrer. Je la descendis à la lumière du
jour et la montrai à mes grands-parents. Ils accueillirent cette
découverte sans effusion particulière. Je fus même gratifié
d’un : « Qu’est-ce tu veux faire de çà ? ».
Je ne comptais pas en rester là et, cédant à mes questions
pressantes et répétées, ils daignèrent enfin me livrer quelques
laconiques informations. Les lettres avaient été écrites par mon
arrière-grand-père paternel à sa femme pendant la guerre de 14.
Les photos étaient celles de mes ancêtres.
Je
n’eus de cesse de demander plus de renseignements. Je cherchai à
identifier les différents personnages photographiés. « Pourquoi
ça t’intéresse ? » m’entendis-je répondre à
chacune de mes nombreuses interrogations. Ils finirent toutefois par
comprendre que je ne les lâcherai pas tant que je n’aurai pas de
réponses. Je dois reconnaître qu’ils firent alors un prodigieux
effort de mémoire.
Je
décalquais chacune des photos de groupe et numérotais les
personnages. Je répertoriais ceux qui étaient identifiés sur un
feuillet annexe. Toute indication biographique y était reportée. Je
sentais que mes « informateurs » commençaient à prendre
plaisir à me narrer quelques anecdotes que je m’empressais de
noter. Ils me trouvèrent d’autres documents intéressants, mis à
l’écart depuis des lustres, qui alimentèrent mes recherches.
Ce
furent mes premiers émois généalogiques. Je pouvais mettre un
visage sur des bis voire trisaïeux et esquisser mon premier arbre
jusqu’à la 4ème génération. Ce n’est qu’à l’âge
adulte que j’allais consulter les archives départementales pour
remonter chaque branche une par une.
Par
la suite, mon grand-père m’accompagna à plusieurs reprises sur
les lieux où lui-même avait grandi. Nous y fréquentions les
archives municipales, nous promenions dans les villages, berceaux de
notre famille, et plus particulièrement dans les églises où tant
de nos aïeux s’étaient rendus lors des baptêmes, mariages et
cérémonies mortuaires.
Je
commençais aussi à recopier la centaine de lettres écrites par mon
arrière-grand-père de sa mobilisation en décembre 1914 jusqu’à
sa mort à Verdun en mai 1916. Il y donnait quelques détails de son
quotidien, notamment sur les circonstances de sa photo le
représentant en militaire, prise en 1915 pendant la bataille
d’Artois, que j’avais pu sauver de l’oubli. Plus tard, je mêlai
leur contenu avec les événements consignés dans le journal des
marches et opérations de son régiment et ceux relatés par quelques
rescapés ayant combattu dans ses rangs. Je pus ainsi reconstituer le
contexte dans lequel il avait vécu ses années de guerre. En mai
2016, nous avons procédé à une petite cérémonie familiale sur
les lieux-mêmes de sa disparition, la Cote 304.
J’ai
partagé le fruit de mes recherches avec ma famille, laquelle s’est
également passionnée et s’emploie désormais avec moi à
sauvegarder la mémoire de nos aïeux.
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